Les nombreuses épidémies qui foudroient la population
Épidémies, hygiène et santé publique aux XVIIIe et XIXe siècles:
(Liste principalement réalisée à partir d’extraits tirés des ouvrages suivants: Jacques Bernier, La médecine au Québec.
Naissance et évolution d’une profession, p. 165-166; Denis Goulet et André Paradis,
Trois siècles d’histoire médicale au Québec. Chronologie des institutions et des pratiques (1639-1939), p.175-186).
Le docteur Harris affirme que, depuis le début des temps, les maladies infectieuses
(peste, syphilis, choléra, tuberculose, variole, diphtérie, grippe, etc.)
représentent la première cause de mortalité sur la planète.

Par exemple, un peu partout de par le monde, dans les années 1800, variole, scarlatine, rougeole et diphtérie sont des maladies si familières qu'elles sont considérées comme des caractéristiques de l'enfance. Les épidémies de choléra et de paludisme sont légion.
Le typhus et la typhoïde menacent les pauvres,
la tuberculose les riches comme les pauvres.

1639: Épidémie de variole qui frappe durement la nation huronne qui perd plus de la moitié de sa population. La variole réapparaît en 1640, 1641 et 1642.
1659: Épidémie de typhus. Cette maladie était alors nommée «fièvre des navires»,
«fièvre des prisons» et «fièvre pourprée».
Cette maladie fut introduite par le Saint-André, un navire en provenance de France.
1661: Épidémie de variole. Les Attikameks, tribu montagnaise localisée de long de la rivière Saint-Maurice, sont frappés par cette maladie et sont presqu'entièrement décimés.
1663: Épidémie de variole. La variole sévit de façon endémique jusque vers 1665, année où elle affecte les Iroquois qui voient diminuer considérablement leurs populations.
1665: Épidémie de typhus amenée par l’arrivée de bateaux infectés.
1670: Épidémie de variole. Elle frappe principalement la rive nord du Saint-Laurent et la région de Tadoussac. Elle se propage parmi les Algonquins et les Montagnais.
1673: Certaines mesures sont adoptées pour assurer des conditions «élémentaires» d’hygiène.
1678: Épidémie de variole au Sault-Saint-Louis (Caughnawaga). La variole se répand alors parmi de nombreuses autres tribus indiennes et sévit jusqu’en 1682.
1685: Les administrations locales sont désormais responsables d’édicter des règlements concernant la santé publique, les soins médicaux et la salubrité de l’air.
1687: Épidémie de variole. Elle fait des centaines de morts autant chez les Canadiens que chez les Amérindiens au cours de l’hiver de 1687-1688.
1690: Épidémie de variole principalement chez les indiens «Mohégans» (Loups) et chez les Iroquois.
1694: Un règlement est passé pour la ville de Québec. Il stipule qu’un tombereau enlèvera les immondices des rues de la basse-ville chaque semaine pendant le printemps.
1697: Épidémie de variole.
1698: Un règlement de la ville de Québec défend aux habitants de jeter par la fenêtre de leur demeure «aucune eau, saleté et ordure [...]».
1699: Épidémie de variole.
1700: Épidémie de grippe; nombreux décès, surtout chez les personnes âgées.
1702: Épidémie de variole. Elle affecte les villes de Québec, de Trois-Rivières, de Montréal et les campagnes avoisinantes. De nombreuses épidémies de variole viennent affecter les habitants de la Nouvelle-France tout au cours du XVIIIe siècle: 1730, 1734, 1740, 1745, 1747, 1755, 1757, 1759, 1766, 1769, 1775, 1776, 1783.
1706: Une ordonnance interdit désormais la vente de viande provenant d’animaux malades. Elle rend aussi obligatoire la vérification des puits et introduit des mesures de contrôle de la qualité des farines et du pain. Un règlement de police ajoute que les bouchers ont désormais l’obligation de laver et nettoyer l’endroit où ils tuent leurs animaux.
1709: Épidémie de fièvre jaune, appelée aussi «mal de Siam».
1710: Ordonnance qui fait défense de laisser vaquer les cochons dans les rues. Épidémie de fièvre jaune à Québec.
1714: Épidémie de rougeole à Québec.
1718: Épidémie de typhus. Le typhus reviendra hanter les colons en 1740, 1742-1746, 1750, 1756, 1757, 1759 et 1768.
1721: Deux ordonnances sont promulguées pour prévenir l’introduction dans la colonie de l’épidémie de peste qui sévit à Marseilles. La première ordonnance datée du 30 juillet, stipule que «l’équipage de la Princesse de Miscou ne descendra point à terre tant que la maladie ne soit cessée à bord et que préalablement le navire et les matelots n’aient été parfumés par la fumée de goudron et du vinaigre et que les hardes dudit équipage n’aient été blanchies à bord». La seconde ordonnance, en date du 20 octobre décrète que les bateaux partis des ports de la Méditerranée, doivent faire un arrêt à la rade de l’Île-aux-Coudres et indiquer leur arrivée par un signal. Défense leur est faite alors d’envoyer des chaloupes au rivage ou de permettre aux membres de l’équipage et aux passagers de débarquer et de communiquer avec les habitants de la colonie. Il est aussi défendu de décharger les marchandises. Des punitions corporelles sont prévues contre ceux qui enfreignent le règlement. Des médecins ou chirurgiens sont nommés pour inspecter les navires, s’informer auprès des capitaines de leur provenance, des ports visités, des malades à bord, du nombre de morts à bord et des causes de décès. Les navires doivent demeurer à l’Île-aux-Coudres jusqu’à l’obtention d’un laissez-passer délivré après la visite du navire. Cette ordonnance ne sera révoquée que le 19 juin 1724.
1730: Épidémie de variole.
1733: Épidémie de variole qui affecte la colonie pendant cinq mois. On compte des centaines de morts à Québec et à Montréal autant dans la population canadienne que dans la population amérindienne.
1734: Épidémie de «fièvre maligne».
1738: Ordonnance qui fait défense à tous charretiers de la ville et autres, qui seront employés à transporter des immondices, vidanges et décombres de la basse-ville, de les jeter sur les grèves, même à basse marée, sous peine de six livres d’amende.
1740: Épidémie de «fièvre pestilentielle». C’est le navire Rubis, en provenance de La Rochelle, qui introduit cette maladie.
1742: Épidémie de typhus. Montréal est particulièrement affecté.
1750: Ordonnance rendue au sujet du transport des immondices qui sont jetées sur les grèves de la basse-ville. Elle interdit le déversement de déchets sur les rives du Saint-Laurent dans les limites de la ville de Québec.
1755: Épidémie de variole. Elle affecte l’ensemble de la colonie de la Nouvelle-France. Elle coïncide avec l’arrivée des troupes de Montcalm et elle perdure jusqu’en 1757.
1756: Épidémie de typhus.
1757: Épidémie de typhus et épidémie de variole à Québec. Cette dernière est introduite par les réfugiés acadiens qui fuient l’occupation anglaise. On dénombre plus de 500 morts.
1759: Les ordonnances de quarantaines de 1721 sont remises en application à la suite d’une épidémie de variole.
1765: Première mention de l’inoculation de la variole. Cependant, c’est avec l’arrivée du chirurgien militaire britannique Latham, que commence véritablement cette pratique.
1768: Épidémie de «fièvre» (typhus) à Québec.
1773: La syphilis s’étend dans la région de Baie-Saint-Paul. Elle se propage ensuite dans la majorité des paroisses de la colonie vers 1775. On la dénomme «mal de Baie-Saint-Paul». En 1777, elle affecte la région de Montréal, principalement à partir de Terrebonne et de Varennes. Cette maladie prendra, selon certains témoignages, une dimension épidémique vers 1782.
1775: Épidémie de variole. Elle affecte surtout, pendant l’invasion américaine, les troupes britanniques et américaines. L’inoculation est alors pratiquée à l’ensemble des troupes. En mai, un hôpital pour les variolés est érigé dans la région de Montréal. Pendant ce temps, un chirurgien militaire est envoyé à Baie-Saint-Paul avec instruction de soigner gratuitement les personnes atteintes de la syphilis.
1776: Plusieurs médecins se rendent à Baie-Saint-Paul et dans d’autres paroisses pour soigner les personnes atteintes de la syphilis. Il y a aussi une épidémie de variole.
1782: Pétition de plusieurs médecins afin que le gouvernement prennent des mesures contre la propagation de la syphilis.
1783: Épidémie de variole. Elle affecte les habitants de Québec et de nombreux Amérindiens. L’épidémie origine de Sorel et se propage rapidement le long du Saint-Laurent.
1784-1792: Période de grandes misères et décès.
1785: Diverses mesures sont prises pour lutter contre la syphilis. Publication d’un texte expliquant la maladie et envoie de médicaments dans les paroisses où sévit la maladie. Première publication médicale canadienne rédigée par le docteur J. Bowman intitulée «Direction pour la guérison du mal de la Baie-Saint-Paul». Cette brochure est imprimée aux frais du gouvernement et distribuée gratuitement dans les régions rurales.
1787: Publication d’une brochure par R. Jones intitulée «Remarques sur la maladie contagieuse de la Baie-Saint-Paul avec la description de ses symptômes et la méthode d’en faire la cure; à l’usage du clergé et autres messieurs résidant à la campagne». L’auteur de cette brochure s’oppose à l’idée que le mal de Baie-Saint-Paul soit la syphilis.
1791: Une ordonnance donne la permission aux juges de paix de faire des règlements locaux concernant la santé des habitants. Une autre ordonnance de même nature est édictée en 1802.
1795: Loi sur la quarantaine adoptée par la Chambre d’assemblée.
1799: Une épidémie de fièvre typhoïde éclate à Québec et s’étend jusqu’à Montréal.
1800: Acte qui donne de plus amples pouvoirs au gouvernement exécutif pour prévenir l’introduction des maladies pestilentielles ou contagieuses dans cette province. Une sévère épidémie de fièvre typhoïde sévit à Québec.
1801: Début de la vaccination dans le Bas-Canada. Promulgation de l’Acte pour le soulagement des personnes dérangées dans leur esprit et pour le soutien des enfants abandonnés.
1804: Acte qui continue pour un temps limité l’acte intitulé Acte pour le soulagement des personnes dérangées dans leur esprit et pour le soutien des enfants abandonnés.
1815: Acte pour encourager et répandre l’usage de l’inoculation de la vaccine. C’est une politique gouvernementale de vaccination contre la variole. Avec l’appui des deux Chambres, la profession médicale et le clergé, cette loi met à la disposition du corps médical 1000L pour l’organisation d’un «Institut de vaccine». Le docteur J. Wright, inspecteur des hôpitaux de l’armée britannique, est nommé président de l’organisation. Il est assisté de quelques médecins chargés de vacciner dans les différents districts du Bas-Canada. Ces médecins étaient payés en fonction du nombre d’opérations réussies, à raison de deux à quatre shillings chacune. Ce premier programme de vaccination est complété en 1816.
1817: Ouverture de l’Hôpital des Émigrés (premier hôpital pour les émigrés contagieux) situé sur une petite île au nord-est de l’île d’Orléans, dénommée l’île aux Ruaux. Épidémie de typhus qui affecte principalement les immigrants irlandais.
1820: Fondation d’un hôpital temporaire pour les émigrés. Il est situé sur la rue d’Aiguillon dans le faubourg Saint-Jean à Québec.
1822-1844: Mauvaises récoltes, disette, instabilité politique.
1826: Épidémie d’influenza à Québec. Elle affecte près de la moitié de la population et fait de nombreux morts.
1827: Épidémie de fièvre typhoïde à Québec.
1829: Épidémie de variole dans la région de Sainte-Marie-de-Beauce.
1830-1832: Pandémie d’influenza. Elle persistera au Bas-Canada jusqu’en 1832. La variole est réintroduite au Québec par des bateaux infectés. Ce sont les enfants qui sont affectés par la maladie.
1832: Première épidémie de choléra au Canada. Ouverture de la quarantaine à Grosse-Île.
1834: Épidémie majeure de choléra. La loi de la quarantaine et les mesures qui en découlent sont appliquées jusqu’en 1835. Le nombre des victimes s’élève dans le Bas-Canada à environ 2400. L’épidémie cause 1800 décès à Québec, environ 900 décès à Montréal et autour de 2500 décès à Toronto.
1842: La variole sévit à Québec.
1844: Épidémie d’influenza.
1847[été]: Épidémie de typhus. Il s’agit de la plus grave épidémie de ce genre qu’ait connue le Bas-Canada. La maladie est introduite à la suite de l’arrivée de navires chargés d’immigrants irlandais. Les navires qui transportent à Montréal les immigrants irlandais reçoivent l’ordre d’amarrer à la pointe du Moulin-à-Vent plutôt qu’aux quais du port central. On y construit des hangars pour servir de lazarets à Pointe Saint-Charles. Ils contiennent environ 150 malades chacun et sont localisés près du canal Lachine. Le 22 juillet, 3500 immigrants sont dirigés vers ces hangars. Plus de 10,000 malades y seront acheminés et plus de 3000 y trouvent la mort. Les morts étaient «étendus deux ensemble sur une chétive paillasse recouverte d’un drap blanc et d’une couverture de coton gris». Des tentes et des hangars furent également montés sur le terrain du Montreal General Hospital. Cette épidémie aurait fait plus de 5000 morts en mer et 17,000 morts au Bas-Canada. De ce nombre, il y aurait eu plus de 8000 victimes à Québec et à la Grosse-Île et près de 7000 dans la région de Montréal. La majorité des victimes sont d’origine irlandaise. De nombreuses familles canadiennes françaises adoptent alors de jeunes enfants devenus orphelins.

Plus de 6000 Irlandais meurent à Pointe Saint-Charles, à Montréal et plus de 1000 à l’Hôpital de la Marine de Québec.
1847-1848: Épidémie d’influenza.
1849[fin mai — mi-octobre]: Épidémie majeure de choléra au Canada. Le choléra provient des États-Unis et fait son apparition à Kingston à la fin du mois de mai. La maladie sévissait dans plusieurs villes américaines en bordure des rivières Mississippi et Missouri. On la retrouve à Montréal le 15 juin et à Québec entre le 4 et le 12 juillet. Elle s’étend ensuite à tout le pays. L’épidémie affecte la population canadienne jusqu’à la mi-octobre. Elle fait environ 2000 morts dans les villes de Québec, Montréal et Toronto.
1851[août — début octobre]: Quatrième épidémie de choléra. Elle provient des États-Unis. Elle fait son apparition au Canada au mois d’août et se termine au début octobre. Cette fois-ci, c’est un groupe d’immigrants allemands, logés à l’hôtel Sword’s sur la rue Saint-Louis, qui aurait introduit le choléra dans la ville de Québec. Le comité de santé de la ville recourt aux moyens habituels de prévention: quarantaine, désinfection des maisons, contrôle des exhumations. L’épidémie fait 280 morts dans la ville de Québec et environ 60 cas à Montréal.
1852 [25 septembre — 9 novembre]: Cinquième épidémie de choléra. Semblable à celle de 1851, cette épidémie est introduite le 25 septembre à Québec, par le navire Advance en provenance de New York. Elle fait, à Québec, 145 morts durant les mois de septembre à novembre. Le foyer de l’épidémie est une maison de chambre de la rue Champlain où loge un dénommé McKnight, un membre de l’équipage du navire l’Advance. Confinée aux villes de Québec et de Montréal, l’épidémie fait environ 200 morts principalement à Québec.